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1- Rappel sur les activités éligibles au CII
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2. Qu’est-ce que l’amélioration continue (ou le versioning) d’un logiciel ?
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3. La jurisprudence Equadex
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4- Conclusion
Dans 5 minutes, vous saurez

C’est la question que devraient se poser tous les éditeurs de logiciel ! Il faut dire que, chaque année, sur les 10 000 PME qui bénéficient du crédit impôt innovation (CII), plus de la moitié ont une activité dans le numérique et parmi elles on retrouve beaucoup d’éditeurs de logiciel. Ces derniers obtiennent notamment du CII pour les salaires de leurs développeurs.
Des développeurs qui contribuent à concevoir une première version ou une nouvelle version d’un logiciel et qui travaillent, entre deux versions, sur l’amélioration continue du produit, on parle aussi de versioning. Et c’est là que la question se pose : est-ce que ces travaux d’amélioration continue sont éligibles au CII ? Une question qui représente souvent des enjeux de plusieurs dizaines de milliers d’euros.
Devant cette interrogation, il y a les entreprises qui préfèrent ne pas prendre de risque et ne valorisent pas le temps passé par leurs équipes sur ces sujets. Et puis, il y a celles qui l’intègrent et qui ont connu des fortunes diverses face à l’administration… Mais en avril 2025 une jurisprudence est venue clarifier la situation.
1- Rappel sur les activités éligibles au CII
Mis en place en 2013, le crédit impôt innovation permet aux PME de récupérer 20% (à compter du 1er janvier 2025) sur les dépenses engagées en innovation, dans la limite de 80 000 euros par an.
Et les travaux d’innovation éligibles au CII correspondent à :
- la conception ou l’amélioration d’un produit matériel ou immatériel (comme un logiciel) ;
- un produit qui a pour vocation à être mis sur le marché (et donc pas un produit pour un usage purement interne) ;
- un produit qui présente, par rapport à la concurrence, un élément de nouveauté en termes de fonctionnalités, de performances techniques, d’ergonomie ou d’éco-conception.
2. Qu’est-ce que l’amélioration continue (ou le versioning) d’un logiciel ?
Dans une logique agile et DevOps, les logiciels sont souvent développés de manière itérative, avec des cycles courts d’amélioration. Cela inclut :
- la correction de bugs ou failles de sécurité ;
- les mises à jour de compatibilité (OS, navigateur, dépendances…) ;
- l’amélioration UX/UI (ergonomie, navigation, design) ;
- le refactoring de code pour améliorer la lisibilité ou la modularité ;
- l’ajout de fonctionnalités.
Ces travaux relèvent de la maintenance évolutive ou corrective, visant la stabilité et la qualité du produit. Ils sont essentiels, mais reste à savoir lesquels sont éligibles au crédit impôt innovation. Et cela tombe bien, dans une décision du 10 avril 2025, la cour administrative d’appel de Toulouse a éclairci le sujet.

3. La jurisprudence Equadex
Equadex, qui exerce une activité de conseil en systèmes logiciels et d’édition d’applications métiers, a développé un progiciel dénommé « Ulysse » qu’elle a commercialisé en janvier 2013. Puis les équipes d’Equadex ont continué de travailler sur le produit en 2013 et 2014 sans que ces travaux ne s’inscrivent dans le cadre de la commercialisation d’une nouvelle version mais bien dans l’amélioration continue de la version déjà commercialisée. Pour ces travaux de 2013 et 2014, la société Equadex a déclaré et obtenu du crédit impôt innovation.
Mais à la suite d’une vérification de comptabilité, l’administration a rejeté l’éligibilité des travaux et procédé à un redressement fiscal estimant que les travaux de 2013 et 2014 n’étaient que « des mises à jour applicatives sollicitées par divers clients ». La société Equadex a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Nîmes qui a rejeté sa demande. Equadex a alors continué de se défendre, cette fois devant la cour administrative d’appel de Toulouse et a eu gain de cause puisque la CAA de Toulouse a annulé le redressement ! Pourquoi ?
En s’appuyant sur l’analyse technique détaillée et des exemples de maquettes fournies par Equadex, la CAA de Toulouse a estimé que les travaux réalisés après la commercialisation de janvier 2013 ont permis de créer de nouvelles versions, en enrichissant les fonctionnalités présentes et en améliorant l’ergonomie. Elle a donc considéré que ces travaux ne relevaient pas de simples mises à jour, mais bien de développements substantiels, et que ces améliorations qualifiaient les nouvelles versions comme des produits nouveaux, tant sur le plan fonctionnel qu’ergonomique citant par exemple l’intégration de modules de saisie des contrats ou l’intégration de module pour assurer la transmission automatique des chiffrages effectués dans le cadre d’une visio-expertise.
La CAA de Toulouse a même précisé que : « La circonstance que certaines de ces améliorations résulteraient de demandes émises par les clients de la première version de l’application et que les mises à jour en résultant auraient, in fine, été facturées, n’est pas de nature, par principe, à faire obstacle à ce que les nouvelles versions du progiciel intégrant ces améliorations puissent être qualifiées de produit nouveau, dès lors qu’il n’est pas soutenu, par ailleurs, que des produits concurrents comportant de telles fonctionnalités auraient été mis sur le marché au cours des années en litige. »
Autrement dit, même si des demandes clients sont à l’origine de certaines améliorations continues dès lors que cela permet d’aboutir à une fonctionnalité nouvelle sur le marché, cela rend bien les travaux éligibles au CII.
(source : https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000051451533)
4- Conclusion
Pour qu’une amélioration logicielle (versioning logiciel) soit considérée comme éligible au CII, elle ne doit pas correspondre à des mises à jour mineures. Au contraire, les travaux doivent aboutir à une différenciation fonctionnelle, ergonomique ou technique :
- le logiciel doit proposer, au moment des travaux, des fonctionnalités que le marché ne propose pas encore ;
- il doit offrir une plus-value technique, fonctionnelle ou ergonomique significative, démontrable par des benchmarks ou études de marché.
Pour sécuriser votre déclaration de CII et illustrer vos arguments, nous vous conseillons au fil de l’eau de conserver des captures d’écran, des maquettes, des wireframes de vos travaux.
Le fait que vos travaux ne s’inscrivent pas dans le cadre de la commercialisation d’un nouveau produit mais simplement dans l’amélioration continue d’un produit déjà commercialisé, n’est pas un frein en soi.
À titre d’exemples, voici une liste d’améliorations continues qui peuvent vous permettre d’obtenir du CII ou non…
Type d’amélioration logicielle | Éligibilité CII | Raisons |
Correction de bugs, améliorations visuelles |
❌ |
Maintenance ou évolution simple, pas de nouveauté |
Refactoring sans création de nouvelle fonctionnalité |
❌ |
Optimisation interne, sans impact fonctionnel innovant |
Ajout d’un chatbot IA avec NLP propriétaire |
✅ |
Intégration technologique innovante |
Développement d’un moteur de recommandations personnalisé |
✅ |
Innovation algorithmique, différenciation fonctionnelle |
Intégration de l’API Stripe pour les paiements |
❌ |
Usage standard de solutions existantes |
Si vous avez encore des questions concernant l’éligibilité de vos travaux au crédit impôt innovation, nous sommes à votre écoute. Il vous suffit de prendre rendez-vous directement avec nos experts ici :